Conseils de chefs : le gibier

Aujourd’hui le gibier est moins « à la mode » et c’est dommage. J’ai donc voulu tenter de ranimer la flamme des cuisiniers et vous montrer qu’il peut se préparer facilement en prenant conseil auprès de plusieurs grands chefs.

Michel Kayser, chef du restaurant Alexandre à Garons, adore ces trois mois de l’année où le gibier foisonne. Il réfute déjà l'un des principaux arguments de ses détracteurs : son goût un peu fort. « Ce n’est pas le cas d’un gibier très frais ! » affirme-t-il.

Et, pour les cuisiniers qui se lanceraient pour la 1ère fois, il conseille de faire une daube de sanglier ou de biche, très similaire en préparation à une classique daube de bœuf. « Vous ferez une marinade, de 12 à 24h maximum, avec vin rouge et aromates, que vous utiliserez ensuite pour faire la sauce ».

« Pour la garniture, c’est très simple, il suffit de se projeter dans l’environnement de l’animal. Pensez polenta car on les chasse dans les champs de maïs, courges ou encore pommes et coings pour leur saveur sucrée qui se marie si bien avec le gibier ».

« Et bien sûr tous les champignons qui évoquent la forêt sans oublier airelles et épinettes, dont l’acidité relève un plat de chasseur ».

Nous avons aussi suivi Sébastien Gravé à Rungis. Le chef du restaurant Pottoka à Paris, est lui aussi un grand fan du gibier et ses clients attendent avec impatience l’époque du lièvre à la royale, cette recette de cuisinier, que nombres se refusent à préparer.

Pour nous, il a accepté de réaliser l’intégralité de la recette en vidéo : âme sensible s’abstenir mais ensuite quel régal ! Les plus émotifs se contenteront des différentes étapes en mots plutôt qu’en images. 

« Autres astuces de cuisinier », m’explique Michel Kayser, « le sucre et le chocolat ». « Le premier balancera une sauce un peu acide tandis que le deuxième apportera douceur et brillance à une sauce ».

Et dans un registre encore plus inédit, il me recommande d’essayer la fève tonka qui dans un sabayon fait merveille avec des noisettes de chevreuil ou un lièvre comme dans sa recette servie avec des coings.

Pour la cuisson du gibier à plume, une seule règle, m’explique Michel Kayser : ne pas cuire ensemble les cuisses et les suprêmes. Vous aurez des cuisses cuites mais des filets desséchés. Il faut cuire ces derniers en les laissant sur le coffre (la carcasse) et désosser les cuisses pour les farcir : un peu de mie de pain, de lait et les abats du canard par exemple, seront parfaits pour les rendre moelleuses. Les poitrines se servent rôties, 10 minutes au moment de servir.

Arnaud Pitrois, chef du Clos des Gourmets à Paris, est aussi un grand amateur de la cuisine de chasse. Ses préférences vont vers un lièvre de Beauce ou un perdreau gris qu’on aura laissé 8 à 10 jours en plumes, et qu'il accompagne d'un risotto au potiron.

« Le perdreau rouge est plutôt réservé aux cuissons douces et longues en cocotte, car il se dessèche plus vite ».

Mais aussi un faisan en 2 services, le suprême d’un coté et la cuisse confite une nuit dans du gros sel puis rincée et mise à confire dans de la graisse d’oie ou de canard. Ensuite, le tout déposé sur un lit d’embeurrée de chou et vous êtes au paradis !

Et pour un rôti de biche, que l’on trouve aujourd’hui facilement chez un boucher, essayez la sauce Cumberland d’inspiration britannique, aux saveurs d’agrumes relevées d’une pointe de gingembre et de Cayenne ou encore une huile de pépins de raisins dans laquelle auront mariné une poignée de 5 baies – poivre vert, noir, blanc, Sichuan et baies roses - pendant environ 1 semaine. Un simple filet suffira à relever votre viande.

Alors poil ou plume, à vous de choisir !

 Sophie le Menestrel

Terroirs de Chefs