Accord Majeur : Asperges & Vins

Verte, blanche ou violette, l'asperge se consomme dans toutes les régions du monde. Parfois légume de l'ombre, cultivée à l'abri de la lumière (asperge blanche), elle n'en illumine pas moins nos assiettes par la suite. Dégustée crue, elle sera croquante, cuite sa texture deviendra plus fondante, elle reste quoi qu'il en soit une véritable caractérielle. Son amertume en fin de bouche dénature les arômes de la plupart des vins et constitue un indéniable obstacle pour dénicher le bon compagnon de tablée. Comme le chocolat et la truffe on dit parfois que c'est une tueuse de vins ! Mes recommandations pour contourner le piège de l'asperge.

Vivacité ou puissance des arômes

Face à notre fougueuse amie, il faut faire preuve de caractère, on ne dompte pas un lion avec une chèvre...Deux pistes pour enrober son amertume et créer un dialogue entre le flacon et notre indomptable légume : chercher la puissance aromatique, en privilégiant des cépages très expressifs, parfumés et explosifs, ou lui opposer vivacité et acidité, jouer sur le tranchant du vin pour créer contraste et équilibre.

Il faut donc privilégier des vins blancs.


  • Avec une asperge crue et une vinaigrette (ayez quoi qu'il en soit la main légère sur le vinaigre), face à l'acidité de la sauce et l'amertume du mets, un chenin ou un sauvignon bien sec et herbacé, incisif et très vif. Pour le chenin, un vouvray sec du domaine du Clos Naudin, légèrement évolué fera merveille. Un vin strict et droit, tout en tension, à l'acidité marquée pour un accord frais et tonique. Pour le Sauvignon, traversons quelques continents pour aller le chercher en Nouvelle-Zélande. La puissance aromatique, les notes florales, herbacées combinées à la fraîcheur, contribuent à la construction de l'équilibre entre expression du vin et caractère du mets.
  • Pour une asperge blanche cuite, au goût délicat, un grand accord classique avec un Muscat d'Alsace. Choisissez-le sec et fruité, ses arômes subtiles et ses notes printanières en font le prétendant idéal. A la fois fin et aromatique le cépage est très proche du mets dans sa définition. Le magnifique Muscat Grand Cru Kirchberg du domaine Kientzler pourrait par exemple relever avec brio le défi.
  • Avec les asperges vertes et violettes cuites, les arômes sont plus prononcés, l'amertume également. La puissance aromatique du vin est primordiale et, bien que sec, il pourra être plus capiteux et rond. Un grand Viognier sera donc particulièrement opportun. Son fruité prononcé, son charme et son parfum pour un accord haut en couleurs. Très belle association en perspective avec de grands Condrieu (domaine André Perret ou Georges Vernay par exemple).

Le risotto aux asperges (avec quelques copeaux de parmesan) et sa texture crémeuse c'est un appel du pied à un vin blanc gras et rond, bien que minéral et toujours droit. Ici le Chardonnay trouvera toute sa plénitude. Un très vieux Chablis sur des notes miellées et de pierre à fusil, tels les vins des domaines Raveneau, Dauvissat ou Tribut, où s'exprimera la magie des sols calcaires bourguignons et le charme du cépage. Après la porte d'Or de la Bourgogne, le grand écart est aussi possible avec un Pouilly-Fuissé à l'extrémité sud de la région. Lui aussi sera porté par sa minéralité et ses notes beurrées qui engloberont parfaitement le met. Les superbes vins du domaine Guffens-Heynen sont d'excellentes pistes pour transcender cette accord.

N'ayez donc pas peur de l'amertume de l'asperge. Faites ressortir sa délicatesse et son parfum, pour des associations qui fleurent bon le printemps.